Acteurs it

Convention USF : SAP et ses clients échangent leurs visions

Par Bertrand Lemaire | Le | Logiciel

L’USF (association des Utilisateurs SAP Francophones) tient sa Convention Annuelle les 11 et 12 octobre 2023 à Nantes. Comme chaque année, l’éditeur et l’association ont tenu une conférence de presse commune pour faire le point sur les sujets du moment, faisant le bilan des convergences et des divergences.

USF et SAP ont tenu une conférence de presse commune dans une ambiance cordiale. - © Républik IT / B.L.
USF et SAP ont tenu une conférence de presse commune dans une ambiance cordiale. - © Républik IT / B.L.

A l’occasion de la Convention USF 2023 à Nantes, le 12 octobre, SAP et l’USF (association des Utilisateurs SAP Francophones) ont tenu leur habituelle conférence de presse commune. La Convention, cette année, a réuni 1750 visiteurs uniques (contre 1860 à Lyon en 2022) et 3077 en cumulé sur les deux jours (3100 à Lyon). Olivier Nollent, Président Directeur Général de SAP France, avait découvert l’USF peu après sa prise de fonction à Lyon en 2022. Il a confirmé qu’il est impressionné par le dynamisme de l’écosystème SAP et l’ampleur de la Convention USF, premier événement SAP en France chaque année. « C’est le bon moment pour des échanges très constructifs » a indiqué Olivier Nollent. Il peut revenir vers la direction mondiale de l’éditeur avec des retours clients précis, ce qui lui est précieux. Et c’est aussi le moment idéal pour communiquer sur la stratégie de l’éditeur et les innovations produits.

Pour Orlando Appell, « si l’innovation est notre moteur de croissance, il nous faut aussi accompagner nos clients actuels, notre base installée considérable. » L’éditeur a récemment remis en route des ateliers d’accompagnement des clients on premise sur l’existant comme sur leur transformation, soit vers le cloud soit hybride selon les priorités de chaque client et ses contraintes de sécurité ou de réglementation. Le complet on premise semble par contre clairement écarté par l’éditeur à terme. ECC 6 aura une fin de maintenance en 2027 (2030 en maintenance étendue), S/4 vers 2040. Les évolutions sur ECC, en fin de vie, seront limitées aux nécessités réglementaires (facturation électronique obligatoire…). Une manière de migrer en douceur est de conserver un ECC on premise avec un S/4 dans le cloud pour les innovations et évolutions avec une bascule progressive du premier vers le second. Il existe deux versions de S/4 : multitenant (cloud public) et monotenant (cloud privé), « à 80 % identiques » selon Orlando Appell, ne pouvant fonctionner que sur une liste limitative d’environnements certifiés.

La bascule cloud reste un sujet délicat

Le programme Rise s’appuie sur les clouds publics AWS, GCP, Azure et IBM. SAP a encore, pour de très rares clients de très grandes tailles avec des contraintes fortes, des datacenters propres. « Blue et S3ns pourraient être une réponse à la question du cloud de confiance » a jugé Gianmaria Perancin. Olivier Nollent a indiqué que certaines décisions en cours ne peuvent pas encore être commentées, les coûts de certification des environnements n’étant pas neutres. L’apparition d’une norme européenne de cloud sécurisé EUCS (équivalent de la norme française SecNumCloud) est une des clés. Le chiffrement des données privées est possible dans le cloud mais beaucoup d’entreprises disposent de données sensibles (y compris de simples RIB de clients) et les entreprises, pour Gianmaria Perancin, hésitent à basculer dans le cloud à cause de craintes juridiques.

OVHcloud a lancé une offre SAP qui est une offre partenaire ordinaire. Certifier OVHcloud pour Rise serait un investissement important pour SAP (Orlando Appell a évoqué « des dizaines de millions d’euros ») alors que toutes les certifications Rise sont mondiales pour garantir un retour sur investissement suffisant. SecNumCloud s’arrête à l’infrastructure, Rise se consacre à toute la pile informatique. OVHcloud et SAP ont convenu, selon l’éditeur, que la capacité de l’offre du Français n’avait pas le potentiel mondial suffisant. En France, le secteur public est une source majeure de croissance pour SAP, ce qui est une particularité nationale, qui impose des nuances sur la stratégie de l’éditeur par rapport à d’autres pays.

Une multitude de versions en maintenance garantie

Concernant l’augmentation de la maintenance pour les clients installés, Orlando Appell a rappelé que les contrats prévoient une augmentation sur le taux Syntec (8 % cette année) et n’a été que de 5 % en France (2 % en Suisse où l’inflation est moindre). La déclaration de SAP « toutes les innovations seront dans le cloud », qui a été faite presque simultanément à l’annonce de l’augmentation, avait provoqué une réaction négative des clients SAP. Depuis, les précisions apportées par l’éditeur ont calmé les choses. La migration forcée vers le cloud reste un soucis. « Si vous allez voir un éditeur aujourd’hui, quelqu’il soit, il vous proposera du cloud » a soupiré Bernard Cottinaud, vice-président stratégie de l’USF, président de la commission Finances. Olivier Nollent a d’ailleurs rappelé que SAP est sans doute le dernier éditeur à avoir ce genre de discussions avec ses clients : les autres éditeurs ont entièrement basculé. SAP supporte ainsi huit versions de son ERP actuellement, ce qui a un coût non-négligeable, et propose des maintenances garanties sur ses produits jusqu’à 2040.

L’an dernier, l’USF avait compté 7 % de clients ayant achevé leur migration S/4, 20 % ayant commencé le projet. SAP indique qu’environ un tiers a engagé la migration à ce jour (dont 10 à 15 % sur cloud privé). Et la Convention accueille de nombreux ateliers de retours d’expériences sur la migration, Rise ou non. Et SAP confirme que la migration S/4 nécessite de nombreuses compétences qui ne sont pas encore forcément disponibles. Montrer que SAP permet d’innover et de réaliser des projets stimulants est une priorité pour Olivier Nollent afin d’attirer les talents nécessaires, l’éditeur continuant son programme de formation. Beaucoup de projets sont retardés car ECC comprend beaucoup de spécifiques, pour Gianmaria Perancin. La migration S/4 est alors l’occasion de revenir au standard, ce qui n’est pas toujours aisé (y compris dans la relation métiers) et peut être très coûteux. Olivier Nollent a insisté sur le fait que les clients ne doivent pas hésiter à solliciter SAP pour les aider dans cette démarche, y compris très en amont des projets d’évolutions. L’éditeur dispose de 300 collaborateurs, en France, pour appuyer les projets des clients (20 000 dans le monde).

IAG, RSE… des sujets pour demain (ou ce soir)

Mise en avant par l’éditeur parmi les innovations majeures de S/4, l’IAG n’est pas encore un sujet de travail pour l’USF. Pour Gianmaria Perancin, s’exprimant à titre personnel, l’IAG n’est pas mature pour un usage en entreprise. Et Joule ne concernerait qu’au plus une faible proportion des utilisateurs. « Je préfère régler la question de la maintenance avant de m’intéresser à Joule » a relevé Gianmaria Perancin. L’IAG est, de plus, très consommatrice de ressources et donc guère compatible avec les préoccupations environnementales.

Sur la question du reporting RSE, l’USF affiche davantage d’inquiétude. Les responsables SAP et les DSI en entreprises ne sont guère sollicités par les responsables RSE qui utilisent Excel. Or la réglementation qui arrive exigera des données fiables, complètes et auditables. Pour Bernard Cottinaud, vice-président stratégie de l’USF, président de la commission Finances, « SAP a une très belle carte à jouer car l’ERP est par nature intégré. » SAP propose des solutions mais l’offre de l’éditeur ne constitue pas une réponse suffisante en elle-même (il faut une implémentation). Demain, il semble évident que les commissaires aux comptes vont auditer les chiffres RSE. Et, à cet instant là, la pression va brutalement devenir colossale sur la DSI.


Sur la photo

De gauche à droite :

- Orlando Appell, directeur des opérations de SAP France,
- Gianmaria Perancin, président de l’USF (association des Utilisateurs SAP Francophones) et du SUGEN (SAP User Groups Executives Network),
- Olivier Nollent, Président Directeur Général de SAP France,
- Bernard Cottinaud, vice-président stratégie de l’USF, président de la commission Finances,
- Erwan Le Moigne, vice-président événements de l’USF, président de la commission Grand Ouest.


Sur le même sujet

- Convention USF 2023 : les crises, accélérateurs de transformation

- Les utilisateurs de SAP accumulent les sujets de mécontentement

- Convention USF : vent debout face aux crises (le premier jour de la Convention USF 2023)

- Convention USF : cloud, IA et tensions entre SAP et ses clients (le second jour de la Convention USF 2023). 

A propos de l’USF et du SUGEN

L’USF (Utilisateurs SAP Francophones) est une association totalement indépendante de l’éditeur SAP. Elle rassemble les utilisateurs de toutes les solutions de celui-ci, pas seulement les ERP ECC 6 et S/4Hana, en France et en Suisse Romande essentiellement (avec quelques membres d’autres pays).

L’USF rassemble à ce jour 450 entreprises membres (dont 50 du secteur public) représentant 3700 individus participant à ses réunions. Parmi ses membres, il y a 75 % du CAC 40 et 66 % du SBF 120.

Le SUGEN (SAP User Groups Executives Network) est un réseau de responsables d’associations d’utilisateurs SAP à travers le monde. Il permet une coordination et des échanges entre les différents clubs d’utilisateurs.

Gianmaria Perancin est l’actuel président de l’USF et du SUGEN.