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Stéphanie Schaer (DINUM) : « avec le numérique, on peut changer la vie des gens »

Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance

Le 1er juin 2023, la DINUM a organisé un colloque de lancement officiel de sa nouvelle feuille de route pour rappeler ses quatre priorités.

Stéphanie Schaer (à droite), directrice interministérielle du numérique, a ouvert le colloque. - © Républik IT / B.L.
Stéphanie Schaer (à droite), directrice interministérielle du numérique, a ouvert le colloque. - © Républik IT / B.L.

La DINUM (Direction Interministérielle du Numérique, la « DSI groupe » de l’État) a publié une nouvelle feuille de route le 9 mars 2023, environ six mois après la nomination de sa nouvelle directrice, Stéphanie Schaer. Ce 1er juin 2023, des représentants de tous les acteurs du numérique d’État étaient réunis à la Cité Universitaire Internationale, dans le sud de Paris, pour lancer officiellement cette nouvelle feuille de route et en rappeler les grands constituants. Ce colloque a bien sûr été ouvert par Stéphanie Schaer

Celle-ci n’était pas du tout une inconnue dans le milieu du numérique public lors de sa nomination. Ancienne commissaire au redressement productif, elle avait vécu une frustration à l’origine de la création d’une start-up d’État. L’État disposait de toutes les données nécessaires pour s’apercevoir qu’une entreprise était sur une pente dangereuse. Mais celles-ci étaient dispersées et, au final, l’État n’intervenait en général que trop tard. En rassemblant les données, on pouvait donc s’apercevoir du cumul de signaux faibles et déclencher une assistance précoce nettement plus efficace, notamment afin de sauvegarder l’emploi. Ainsi était née la start-up d’État « Signaux-Faibles ». Evoquant cette expérience, Stéphanie Schaer en a tiré une leçon qui, aujourd’hui, la guide dans son action : « avec le numérique, on peut changer la vie des gens ».

Les quatre points cardinaux de l’action de la DINUM

Lors des travaux préparatoires à la feuille de route, au fil des travaux des différents ateliers, les participants avaient pu partager des succès (France Connect, la réussite de l’open-data…) mais aussi des frustrations (comme les dérives des grands projets). De là sont issus les nouvelles priorités de la DINUM. Celles-ci sont regroupés en quatre directions, comme des points cardinaux de l’action du numérique du l’État. Ces priorités ont été d’ailleurs expliquées en détail par Stéphanie Schaer dans sa récente interview. https://www.republik-it.fr/decideurs-it/gouvernance/stephanie-schaer-dinum-le-numerique-est-au-coeur-de-la-reussite-des-politiques-publiques.html Chaque point cardinal a été l’objet d’un développement sur scène lors du colloque avec des témoins issus de différentes administrations.

Le premier point cardinal réjouira tout contribuable puisqu’il s’agit d’améliorer la conduite de projets, en particulier en adoptant davantage d’agilité avec une logique directement importée des start-ups d’État. Cette logique a été initialement expérimentée au sein de Pôle Emploi comme l’a rappelé Franck Denié, DGA en charge de la DSI de Pôle Emploi. Ce service public a ainsi adopté la méthodologie SAFe et une approche par évolution incrémentale de produits en lieu et place de projets pharaoniques. Ce alors que le SI est l’outil de travail de base de 55 000 conseillers et la pierre angulaire des services rendus tant aux usagers qu’aux entreprises. Pierre Pezziardi, actuellement conseiller auprès de la DINUM, a, lui, insisté sur le fait que l’agilité en soi ne suffisait pas. Il faut de « l’agilité à impact », c’est à dire que l’agilité doit aboutir à des résultats utiles. « L’agilité n’exclut pas le contrôle » a relevé Stéphanie Schaer. Reste à savoir si l’agilité est consubstantielle à la confiance.

Data, formation et souveraineté

Deuxième point cardinal de cette feuille de route, il s’agit aussi pour la DINUM de contribuer à renforcer significativement les compétences numériques au sein de l’État, en particulier avec de nouvelles offres de formation. Pour cela, Jérémie Vallet, adjoint à la DINUM est intervenu aux côtés de Benjamin Marteau, directeur de la plateforme Pix. Celle-ci connaît un réel succès et va continuer d’évoluer et d’approfondir ses services avec une méthode inchangée en trois temps : évaluation, formation, certification.

Avec la même idée que Signaux-Faibles, la data doit être encore mieux exploitée. Les usages permettant une amélioration de la performance de l’État sont en effet nombreux : le « dites-le-moi une seule fois », la détection des fraudes… La France est aujourd’hui le pays européen champion de l’open-data et le troisième au monde (plus de 45000 jeux de données de qualité et utilisables sont actuellement disponibles comme l’a rappelé Marielle Chrisment, directrice d’Etalab). Le conseiller au numérique du Président de la République, Guillaume Rozier, a, lui, rappelé que toutes les données ne pouvaient pas être ouvertes (notamment les données personnelles) mais que les échanges au sein de l’État devaient aussi s’intensifier, notamment pour automatiser certains traitement en mode « dites le moi une seule fois » sans que l’usager n’ait à réclamer un droit.

Enfin, quatrième point cardinal, la préservation de la souveraineté numérique de l’État. Le renforcement du RIE (Réseau Interministériel de l’État) actuellement en cours concerne les infrastructures. Mais les applicatifs souverains vont eux aussi se multiplier à la manière de la messagerie instantanée Tchap. Pour Florian Delezenne, directeur de l’opérateur des produits interministériels, les logiciels libres sont un outil évident qui, de plus, accroissent l’agilité. L’État va chercher des partenaires pour l’accompagner dans cette voie, notamment le Cigref. Audran Le Baron, directeur du numérique pour l’éducation au Ministère de l’Education Nationale, a rappelé que le développement de logiciels libres suppose de réinternaliser des compétences informatiques.


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