Gaëtan Demoures (SGM/BHV) : « commencer le carve-out par le collaboratif a créé un socle sain »
La Société des Grands Magasins (SGM) a racheté le Bazar de l’Hôtel de Ville (BHV) au groupe Galeries Lafayette. Gaëtan Demoures, DSI de la SGM, a mené un carve-out complexe dans un contexte de changement de dimension du groupe. Il a commencé par la bureautique collaborative en s’appuyant sur Insight.
La SGM est un acteur encore peu connu. Pouvez-vous nous la présenter ?
La Société des Grands Magasins a été créée en 2018. Il s’agit d’une foncière immobilière revalorisant des centres commerciaux de centre ville (rénovation, commercialisation d’enseignes attractives, revalorisation…). Nous avons douze centres commerciaux en France, toujours en centre ville. Nous n’intervenons pas sur les centres commerciaux en banlieue.
Depuis 2022, nous exploitons des grands magasins, toujours en centre ville, plutôt en villes moyennes (Reims, Grenoble, Mulhouse…). Nous avons repris en franchise des magasins Galeries Lafayette dont l’IT reste gérée par le groupe Galeries Lafayette.
En 2023, ce groupe voulait vendre le Bazar de l’Hôtel de Ville (BHV), notamment le magasin historique de la Place de l’Hôtel de Ville à Paris. Nous l’avons acquis. C’était notre première implantation dans une très grande ville. Comme le groupe Galeries Lafayette est très intégré, il nous fallait reconstruire toutes les structures transverses du BHV, dont l’IT. Comme la plupart du temps dans ce genre de cas, nous avons bénéficié d’un TSA (Transition Service Agreement). Celui-ci s’achève le 31 décembre 2025.
Dans le même temps, le groupe SGM changeait de dimension. Il n’existait pas encore de réelle DSI. Il fallait donc construire la DSI de SGM tout en séparant le BHV du groupe Galeries Lafayette. C’est à ce moment là que j’ai rejoint SGM pour mener ce double chantier.
Justement, comment est organisée la DSI de SGM/BHV ?
La DSI est commune pour l’ensemble du groupe SGM, BHV inclus. Mais le carve-out du BHV était la priorité. La DSI pilote désormais tous les systèmes, des finances et de la RH aux infrastructures de centres commerciaux en passant par l’encaissement, y compris dans les enseignes de restauration du groupe. Data, cybersécurité, etc. sont également sous mon autorité.
Les fonctions « digital » et « e-commerce » pré-existaient. Mais c’est un métier différent, relevant du commerce. Elles m’ont été rattachées un certain temps mais elles sont de nouveau séparées.
Si le groupe est lyonnais avec un siège à Lyon, les besoins étaient beaucoup plus importants à Paris avec le BHV. La DSI est donc à Paris. Mais avant même l’hypothèse du rachat du BHV, la croissance du groupe amenait la nécessité de créer une véritable DSI à court terme.
Nous nous sommes fait accompagner par OnePoint pour l’AMOA et par Insight pour le socle d’infrastructure et de collaboratif.
Comment est architecturé votre SI ?
Avant la création de la DSI, le SI financier (Sage X3) était géré par la DAF, le SIRH (ADP) par la DRH. DAF et DRH ont été les premiers à réclamer la création d’une DSI.
Dans nos SI, tout est en SaaS, même l’encaissement en magasin (les caisses peuvent fonctionner en mode dégradé autonome en cas de panne réseau). Sans véritable DSI, il n’était pas possible de faire autrement. Et c’est une approche qui n’a pas changé, d’autant que les besoins précédaient les recrutements au sein de la DSI et la création des infrastructures.
Mais nos métiers sont variés. Le métier de foncière n’est pas celui d’un grand magasin ou celui d’un point de restauration. Les besoins et les contraintes ne sont pas les mêmes. Chacun doit donc disposer de la solution adaptée à son métier. Même pour l’encaissement, nous avons plusieurs solutions.
Nous avons signé les contrats pour mettre en place le SI cible en mars 2023 et nous avons eu moins d’un an pour tout mettre en place et synchroniser les données. En mars 2025, nous avons mis en production l’encaissement un lundi matin. Dans le monde des grands magasins, il n’y a pas réellement de période creuse où l’on pourrait faire des migrations tranquillement avec des utilisateurs métiers disponibles.
Le SI actuel est, à quelques détails près (quelques périmètres métiers restreints à migrer d’ici le 31 décembre, un peu d’infrastructure…), le SI cible.
Nous avons conservé ADP pour le SIRH et Sage X3 pour les fonctions finance pour l’ensemble du groupe. Le paiement repose sur Adyen. Nous avons plusieurs solutions de CRM : Comarch, Splio (marketing automation), Zendesk… Pour la supply chain et la gestion commerciale du BHV, nous avons déployé SAP S/4. Celui-ci déverse les données comptables dans Sage X3 car nos métiers sont trop différents les uns des autres pour aisément tout mettre dans S/4. Mettre dans SAP la comptabilité d’une foncière est à la fois très compliqué et très lourd, par exemple.
Avec une telle diversité d’outils et des clients comme des fournisseurs communs à plusieurs métiers, je pense que vous comprenez que la facturation électronique obligatoire va nécessiter un certain travail chez nous.
Vous avez commencé le carve-out du BHV par le collaboratif, ce qui est assez étonnant. Pourquoi ce choix ?
En effet, la bureautique et le collaboratif ont constitué le premier chantier lancé. SGM utilise depuis toujours les outils Microsoft, les Galeries Lafayette les outils de Google. Nous voulions mettre tout le monde au même endroit. La couverture fonctionnelle de Google est inférieure à celle de Microsoft et certains utilisateurs exigeaient de toutes façons d’avoir Excel. Devions nous choisir un « best of breed » ou tout mettre sous Microsoft ? Nous avons choisi Microsoft Office 365 qui était nativement intégré avec Sharepoint, Defender, etc. pour créer un environnement numérique de travail complet.
Une fois ce choix fait, il fallait aussi déployer les postes, configurer la cybersécurité, etc.
Or migrer de Google à Microsoft n’est pas quelque chose de courant. Il y avait peu de prestataires capables de nous accompagner sur la globalité d’un tel projet, y compris le déploiement des postes de travail. Assez rapidement, Insight s’est imposé. Ce prestataire a été capable de nous accompagner avec les experts nécessaires sur chaque sujet et en quantité suffisante.
Nous avons commencé le carve-out par le collaboratif et la bureautique parce que cela a créé un socle sain, capable de supporter le reste. Ce chantier a notamment intégré la question de la gestion des identités sous Active Directory. Et cela a permis a réaliser la séparation nette avec le SI des Galeries Lafayette.
Comment avez-vous mené ce chantier ?
Nous fait fait le cadrage et le design en juin 2024 et le go live a eu lieu en novembre 2024, le lendemain de l’inauguration des vitrines de Noël…
La mise en œuvre a été complexe car nous migrions des utilisateurs d’un tenant unique de tout le groupe Galeries Lafayette à un tenant unique de tout le groupe SGM. Il fallait aussi réaliser la gestion du changement pour les anciens utilisateurs Google afin de les former à Microsoft Office. Insight a également réalisé cet accompagnement et la formation pour un millier de collaborateurs, souvent seniors. Cette ESN a également réalisé le déploiement des postes de travail neufs sous Windows 11.
Pour déployer les environnements de travail, nous recourons à Autopilot de Microsoft. Lorsqu’un PC se connecte pour la première fois, toute la configuration et outils associés sont automatiquement téléchargés et paramétrés. De ce fait, si un PC tombe en panne, je peux aller dans n’importe quel magasin, acheter un PC quelconque, et en quelques instants le poste sera configuré. L’utilisateur retrouvera toutes ses données.
Notre principal problème a été les drives. Certains ont nécessité de migrer plusieurs To de données. Comme les communications entre utilisateurs Google et Microsoft n’étaient pas forcément simples, nous avons, autant que possible, procédé par groupes homogènes d’utilisateurs. Je dois admettre que, sans Insight, nous n’aurions pas pu relever tous les défis tant dans la logistique que dans la gestion des identités. Il a été parfois nécessaire de pointer physiquement dans les bureaux qui devait migrer et qui restait au sein des Galeries Lafayette…
Quels sont vos projets pour 2026 ?
Une fois le carve-out du BHV achevé, nous aurons à retravailler sur le reste du groupe SGM. Le chantier BHV a permis de monter en maturité et il faut veiller à diffuser cette nouvelle maturité sur l’ensemble du groupe.
Mais nous ne pouvons pas tout faire en même temps. Les coûts sont importants.
Evidemment, nous avons à traiter de nombreux enjeux autour de la data et de l’IA. Nous avons aujourd’hui le socle technique commun nécessaire pour capter une data de qualité mais, désormais, il nous faut la valoriser. Je ne crois pas à l’assistance à la vente par IA : un client ne tient pas à ce que le vendeur soit le nez sur le smartphone au lieu de l’écouter. Par contre, je pense que l’IA peut permettre de gagner beaucoup de temps pour préparer les journées de vente, les rendez-vous fournisseurs pour les acheteurs, etc. Là aussi, je crois qu’il nous reste un peu de travail.
Podcast - Pourquoi SGM/BHV a commencé son carve-out par la bureautique
La Société des Grands Magasins a changé de dimension en rachetant le BHV au groupe Galeries Lafayette. Mais le carve-out a été très délicat tant les entités étaient mêlées. Gaëtan Demoures, DSI de la Société des Grands Magasins, explique ici comment il a mené ce carve-out, en s’appuyant sur les équipes d’Insight, et pourquoi il a commencé par la bureautique collaborative.