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Comment Lucky Cart maîtrise les coûts de traitements de la data

Par Bertrand Lemaire | Le | Cas d’usage

Acteur du traitement de la data marketing pour la grande distribution, Lucky Cart recourt bien sûr au Cloud mais en maîtrisant ses coûts.

Nicolas Trannoy est Strategic planning innovation & marketing de Lucky Cart. - © Lucky Cart
Nicolas Trannoy est Strategic planning innovation & marketing de Lucky Cart. - © Lucky Cart

Le néologisme « smart commerce » renvoie à un usage intense de la data pour rendre l’activité commerciale d’un distributeur plus efficace, plus pérenne et plus profitable. C’est la spécialité de Lucky Cart. « Nous avons deux expertises : la data science et les métiers de la grande consommation » explique Nicolas Trannoy, Strategic planning innovation & marketing de Lucky Cart. Cette entreprise d’une soixantaine de collaborateurs et de dix millions d’euros de chiffre d’affaires (en forte croissance) ne veut pas être vue « simplement » comme un acteur du e-retail media mais bien comme une data tech company. Pour réaliser les traitements de données requis par son activité, Lucky Cart utilise bien sûr le cloud public. Mais, pour éviter une explosion des coûts, l’entreprise a adopté une approche FinOps.

La quasi-totalité des grands distributeurs français (en dehors d’enseignes nordistes) fait partie des clients de Lucky Cart. La société collecte les données issues des tickets de caisse en magasins et drives ainsi que des activations sur les sites e-commerce. Nicolas Trannoy précise : « nous collectons un à deux millions de tickets par jour et notre stock est d’environ vingt milliards. Bien entendu, tout est anonymisé. »

Le choix du cloud public

L’objectif est de personnaliser au maximum les offres faites aux consommateurs. En particulier, des algorithmes sont utilisés pour émettre les bonnes promotions auprès des bons consommateurs au bon moment. Il s’agit, en fait, de savoir qui va voir quelle promotion et quand. Et, pour cela, l’essentiel est bien sûr la data initiale. Encore faut-il disposer des données et de la capacité de calcul nécessaires. Pour cela, adopter le cloud public allait de soi afin de bénéficier de toutes les ressources à chaque fois qu’utile mais pas en permanence.

Beaucoup d’enseignes, en France, utilisant Google Cloud Platform (GCP), ce choix était logique pour limiter les transits de données. Mais ce n’est clairement pas le motif principal du choix de cette plate-forme. « Les outils de Google sont les plus puissants sur le marché pour des usages comme les nôtres » justifie Lamia Benaouali, data ingeneer chez Lucky Cart. Pour Nicolas Trannoy, durant des années, les enseignes ont sous-exploité les données mais, aujourd’hui, commencent à en saisir toute la richesse et le potentiel.

De la collecte au traitement : la nécessité du FinOps

La collecte de données s’effectue en principe par API. Tout est stocké sur des serveurs européens de GCP afin de faciliter la conformité RGPD. La majorité des données sont traitées dans Big Query pour l’analytique, les données les plus chaudes étant plutôt analysées avec Big Table. Lucky Cart lance une trentaine d’opérations par mois, sur des centaines de teraoctets. Cela représente 500 000 à un million de requêtes Big Query par mois. En tout, le budget GCP de Lucky Cart est de l’ordre de 200 000 à 500 000 euros par an. Nicolas Trannoy reconnaît : « au niveau mondial, nous sommes un tout petit client pour GCP mais, en France, nous représentons tout de même beaucoup de données. »

L’approche FinOps consiste à réaliser des choix techniques en lien avec la tarification. « Il ne s’agit pas seulement d’arbitrer entre fournisseurs, le changement ayant en lui-même un coût » insiste Nicolas Trannoy. En l’occurrence, pour Lucky Cart, le choix de GCP était clair. Mais il fallait tout de même maîtriser strictement l’enveloppe budgétaire et éviter une explosion des coûts. Chaque outil déployé devait voir ses coûts limités au maximum. La problématique a été particulièrement importante entre 2022 et 2023 lorsque de nouveaux gros clients sont entrés dans le porte-feuille de Lucky Cart.

Optimiser l’emploi des ressources

Outre la question des coûts, cette forte croissance de la quantité de données traitées a amené Lucky Cart à moderniser ses outils et veiller à mieux stabiliser ses systèmes. Brutalement, il y avait plus de données entrantes, plus de données sortantes et davantage de calculs. Il fallait donc optimiser les recours aux ressources pour éviter une explosion des coûts. Cette maîtrise permet aussi de discuter des tarifs avec Google France en arbitrant entre les différents types de tarifs.

Par exemple, selon les cas, il peut être plus pertinent de s’engager sur une consommation de ressources dans la durée tandis que, dans d’autres cas, il faudra plutôt adopter du strict on demand. De la même façon, les modes de chargements des données doivent être travaillés. Enfin, les algorithmes doivent aussi être optimisés pour limiter la facturation de ressources par Google. Lamia Benaouali résume : « il faut un équilibre entre le bon niveau de service, l’utilisation raisonnée de la donnée et l’utilisation raisonnée des ressources. »

De nettes économies

Etant donnée la forte augmentation de la consommation de ressources entre exercices successifs, il est difficile pour Lucky Cart de définir avec précision l’effet exact des optimisations à tous niveaux opérées ou la différence qui aurait été constatée avec une situation non-optimisée. Cependant, l’optimisation opérée a permis, par exemple, de gagner 45 % du chargement des profils. « C’est d’autant plus important quand GCP, comme l’été dernier, augmente ses tarifs de 25 %… » expose Nicolas Trannoy.

2024 sera une année de grands défis pour Lucky Cart. Les Jeux Olympiques vont ainsi avoir un fort impact sur la consommation donc sur les campagnes opérées. La quantité de données va encore augmenter. Nicolas Trannoy relève : « les marques et les distributeurs investissent déjà, en France chaque année, environ cent milliards d’euros en promotion et la croissance attendue de cette dépense nous amène un enjeu technique data et un enjeu business autour de nouvelles offres. » Malgré les évolutions technologiques incessantes, Lucky Cart doit, de plus, rester pertinent. Enfin, l’entreprise s’implante au Maroc, ce qui va évidemment entraîner une croissance des données traitées.