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Luc Gille (Clariane) : « nous cherchons une seule source de vérité »

Par Bertrand Lemaire | Le | Gouvernance

Le groupe de soins et de services aux personnes fragiles Clariane accroît ses usages de la data pour améliorer sa performance. Luc Gille, Group Chief Data Officer de Clariane, explique que, notamment, cela passe par le rapprochement de l’opérationnel local et des usages groupe autour d’une source de vérité unifiée.

Luc Gille est Group Chief Data Officer de Clariane. - © Républik IT / B.L.
Luc Gille est Group Chief Data Officer de Clariane. - © Républik IT / B.L.

Pouvez-vous nous présenter Clariane ?

Clariane est un groupe présent dans six pays en Europe (France, Italie, Espagne, Allemagne, Belgique et Pays-Bas). Il est centré autour du soin et du service à la personne auprès de publics fragiles. Notre raison d’être est de « prendre soin de l’humanité de chacun dans les moments de fragilité ». Notre chiffre d’affaires est d’environ cinq milliards d’euros réalisés grâce à nos 60 000 collaborateurs répartis dans un millier d’établissements.

Nous sommes surtout connus au travers de nos différentes marques. En France, nous avons ainsi les EHPAD et maisons de retraites médicalisées Korian, les cliniques et centres de rééducation Inicea, l’assistance à domicile Petits-Fils, la colocation de personnes âgées Ages & Vie… Dans d’autres pays, il peut y avoir d’autres activités comme la chirurgie en Italie.

Retrouvez Luc Gille à la Nuit de la Data et de l’IA

Luc Gille est membre du jury des Trophées de la Nuit de la Data et de l’IA. Il va donc assister aux présentations des candidats le 15 janvier 2025 et interviendra à la cérémonie le 3 février 2025 au Théâtre de la Madeleine.

Informations et inscriptions.

Comment sont organisées les fonctions IT et Data chez Clariane ?

Clariane a beaucoup grandi grâce à la croissance externe via de nombreuses acquisitions. Historiquement, nous avions donc un SI par pays voire par activité au sein d’un pays. Mais, depuis un peu moins de dix ans, nous avons mis en place une logique d’uniformisation même si les équipes IT et data étaient par pays.

En 2020, nous avons mis en place une équipe groupe avec une vision de centralisation progressive de l’IT et de la data. Les pays voient donc leur rôle et leur responsabilité se centrer autour du service de proximité tandis que la stratégie et le régalien passent au niveau groupe.

En matière de data, de quoi parle-t-on chez Clariane ?

Bien évidemment, nous avons les données de gestion classiques de toutes les entreprises. Dans notre secteur où le recrutement est compliqué avec un turn-over assez important, les données collaborateurs (RH) revêtent une particulière importance.

Nous avons bien sûr des données sur les résidents et patients de nos établissements. Il s’agit de données relevant soit du médical soit du marketing et de a facturation.

Et puis nous avons aussi des données sur les établissements eux-mêmes : consommation d’énergie, incidents (violences, pannes, réclamations…), résultats d’audits, modélisation BIM…

La maturité est très variable selon le pays et les activités. Les données BIM peuvent ainsi aller d’un simple fichier Excel à un réel jumeau numérique.

Quelles précautions prenez-vous concernant les données sensibles sur les personnes, notamment médicales ?

Le stockage s’effectue dans un cloud certifié HDS (en l’occurrence Azure HDS).

Surtout, seul le personnel soignant habilité a accès aux informations médicales des résidents et patients.

Quels usages avez-vous de la data ?

Nous avons deux grands types d’usages que nous devons réconcilier.

Le premier, au niveau groupe, concerne nos obligations réglementaires comme les publications obligatoires. L’équipe data groupe doit ainsi consolider les données pour réaliser les rapports nécessaires. C’est notamment le cas pour les données extra-financières nécessaires pour le rapport CSRD.

Et puis il y a les besoins opérationnels au niveau du terrain. Jusqu’à présent, ce niveau est entre les mains des équipes data par pays.

Quels projets menez-vous autour de la data ?

Nous cherchons une seule source de vérité. Nous voulons réconcilier le niveau groupe et le niveau opérationnel pour obtenir des données fiables, objectives et communes. Nous réalisons de plus en plus d’intégration en rapprochant les équipes pays et groupe. En France, c’est déjà le cas avec une équipe unique à la fois groupe et pays.

Nous avons aussi, bien sûr, des projets très pratiques.

Par exemple, nous consolidons les données de consommation d’énergie. Il s’agit de confronter la consommation d’énergie et les températures relevées dans les bâtiments par des capteurs connectés.

En lien avec les nécessités de notre certification ISO 9001, nous avons des projets en matière de qualité de service. Il s’agit de corriger les problèmes de sous-qualité en intervenant dès que nécessaire.

A partir de données médicales ou de suivi des résidents et patients, nous devons vérifier que ce suivi est au niveau attendu. Nous suivons ainsi les décès, les chûtes, la définition effective d’un projet personnalisé par chaque résident d’EHPAD, un taux d’escarres acquises…

L’IA est-elle un sujet pour vous ?

Bien sûr ! Pour l’heure, nous sommes au stade du prototypage.

Le premier projet concerne la réponse aux avis Google par IAG. Nous avons en effet un millier d’établissements à travers l’Europe et il peut y avoir plusieurs avis par jour et par établissement, notamment pour les cliniques. C’est une technologie qui est prometteuse sur des grands volumes de textes, notamment les réclamations et les événements indésirables graves.

Dans tous les établissements avec une dimension médicale, vous savez que les transmissions faites au sujet des actes et des incidents sont fondamentales. Or, quand un professionnel n’intervient que ponctuellement ou revient d’une période d’absence, il peut avoir un grand volume de texte à consulter et comportant des éléments dont il n’a pas besoin vue sa spécialité. L’IAG peut ainsi servir à la synthèse des transmissions. Nous pouvons aussi utiliser l’IAG pour réaliser, au niveau groupe, une synthèse des événements indésirables graves afin de définir des axes d’efforts à mener en priorité malgré le grand volume de texte.

Pour l’heure, c’est très expérimental. Nous voulons être certains de ne pas passer à côté de quelque chose d’important, ce qui pourrait engager ensuite notre responsabilité.

Quels défis voyez-vous pour 2025 ?

En tout premier lieu, je citerais le grand rapprochement des équipes et l’unification entre la data groupe et la data pays. Nous voulons, en effet, obtenir une seule vérité par la data.

Bien sûr, la guerre des talents reste un problème. Parler le langage des métiers tout en ayant l’expertise data est difficile.

Enfin, nous devons davantage opérationnaliser la prise de décision en mode data-driven en nous basant sur les indicateurs clés de performance (KPI).

Podcast - Comment Clariane expérimente l’IAG en synthèse de texte

Clariane est un groupe spécialisé dans le service à la personne fragile via des maisons de retraite médicalisées, des cliniques de rééducation, de l’assistance à domicile, etc. dans six pays européens. Luc Gille, Group Chief Data Officer de Clariane, revient ici sur les usages de l’IAG au sein du groupe, notamment pour synthétiser des documents et des rapports.