SAP réinvestit massivement sur la souveraineté
SAP Sovereign Cloud va bénéficier d’un investissement de plus de 20 milliards d’euros pour mieux servir les entreprises européennes. Gianmaria Perancin, président de l’USF, commente les annonces effectuées.

Contrairement à son concurrent Oracle qui a développé ses propres infrastructures Cloud, y compris en Europe avec des filiales « protégées », SAP a misé depuis plusieurs années sur les hyperscalers, choix qui déplaît à ses clients européens, notamment publics. Les offres alternatives étaient jusqu’à présent peu valorisées. Le 2 septembre 2025, SAP a réalisé une annonce majeure qui amorce une évolution stratégique avec un « investissement de long terme » (dix ans) de plus de 20 milliards d’euros pour faire « de la souveraineté numérique une priorité stratégique ». Les clients ne peuvent évidemment que se réjouir de cette annonce. « Nous avions besoin d’un tel engagement » confirme Gianmaria Perancin, président de l’USF (association des Utilisateurs SAP Francophones) et du SUGEN (SAP User Groups Executive Network, réseau des dirigeants de clubs utilisateurs SAP dans le monde).
SAP disposait déjà d’une offre, SAP Sovereign Cloud, se déclinant en SAP Cloud Infrastructure et SAP Sovereign Cloud On-Site. A priori, il ne s’agit donc pas, avec cette annonce, d’une révolution. Pourtant, il faut bien constater un revirement stratégique de l’éditeur. Celui-ci indique clairement : « les clients peuvent désormais choisir parmi de nouveaux modèles de déploiement leur offrant un contrôle étendu sur l’infrastructure, la plateforme et les logiciels, en fonction de leurs besoins réglementaires et opérationnels spécifiques ». Gianmaria Perancin pointe cependant : « quel sera le coût de ces offres pour les clients de SAP ? Pour l’instant, nous n’avons pas l’information. »
Des offres managées garantissant la souveraineté
SAP Cloud Infrastructure est une plateforme IaaS opérée sur une base open-source au sein du « réseau de datacenters SAP ». Ce dernier comprend bien sûr le datacenter situé à Waldorf, au siège de SAP. Mais quels autres datacenters entrent dans ce « réseau » ? « Si ce sont des machines posées dans des locaux d’hyperscalers, la question de l’immunité aux lois extraterritoriales américaines pourrait tout de même se poser » s’inquiète Gianmaria Perancin.
SAP Sovereign Cloud On-Site est une infrastructure « opérée par SAP, installée dans un datacenter détenu ou sélectionné par le client ». Pour l’éditeur, il s’agit d’une solution qui offre « le plus haut niveau de souveraineté tout en maintenant l’innovation Cloud et l’architecture de SAP ». Selon Gianmaria Perancin, cette offre se caractérise par le fait que l’éditeur fournit les machines et opère totalement l’implémentation même cela se fait dans les murs du client.
L’hébergement dans des infrastructures propres reste possible
« SAP ne veut pas certifier d’infrastructures opérées par des tiers sur des infrastructures qu’il n’a pas mises en œuvre, par exemple chez OVH » relève Gianmaria Perancin. Héberger SAP chez OVH, chez un autre hébergeur qui utilise ses propres infrastructures ou on premise n’entre donc pas dans le plan d’investissement annoncé. SAP propose cependant une offre baptisée « Delos Cloud » conçue pour « accompagner la transformation rapide et sécurisée du secteur public et répondre aux exigences spécifiques de souveraineté nationale ». Cette offre concerne a priori le marché du secteur public allemand, Delos étant une filiale spécifique montée avec le gouvernement fédéral allemand. L’USF se demande si finalement l’offre DeLos en Allemagne pourrait être comparable à celle de Bleu (même si celle-ci pourrait être plus sécurisante car elle devrait être a priori conforme SecNumCloud 3.2).
Différentes des déploiements on premise, ces offres SAP Sovereign Cloud étaient jusqu’à présent peu promues, notamment en France. Gianmaria Perancin s’étonne : « nos adhérents exprimaient beaucoup d’inquiétude sur la question de la souveraineté mais, quand nous demandions aux responsables SAP en France, ils expliquaient qu’il y avait très peu de demande, ce qui expliquait la faible promotion des offres souveraines. » L’USF n’a trouvé qu’un seul client Cloud Infrastructure, un opérateur public portugais. En France, la tendance, notamment dans le secteur public, est jusqu’à présent plutôt d’héberger dans des datacenters propres. C’est notamment le cas pour le système Chorus de gestion de l’exécution budgétaire de l’État. « Soyons pragmatiques plutôt que puristes : SAP s’engage, SAP investit, réjouissons-nous ! » veut retenir Gianmaria Perancin. Il ajoute cependant : « nous devons mieux analyser les offres pour aider nos adhérents à faire les bons choix. Et il va aussi falloir que SAP France promeuve effectivement ces offres. » Gageons que le sujet sera au coeur de la prochaine Convention de l’USF à Lyon les 8 et 9 octobre 2025.