Rh

Cornélia Findeisen (DINUM) : « le Campus du Numérique Public associe digital et présentiel »

Par Bertrand Lemaire | Le | Formation

Le 9 janvier 2024 est inauguré le Campus du Numérique Public. Cornélia Findeisen (DINUM) en explique les raisons d’être et modalités.

Cornélia Findeisen est cheffe du département « RH de la filière numérique de l'État » à la DINUM.  - © DINUM
Cornélia Findeisen est cheffe du département « RH de la filière numérique de l'État » à la DINUM. - © DINUM

Pouvez-vous nous rappeler votre rôle ?

Je suis cheffe du département « RH de la filière numérique de l'État » à la DINUM (Direction Interministérielle du Numérique), la « DSI groupe » de l’Etat. Comme je l’indiquais dans ma précédente interview, la filière numérique de l’État concerne tous les agents de l’État, quelque soit leur statut, qui travaillent dans l’informatique et le numérique. Il peut s’agir de titulaires de catégories A/A+ ou B (techniciens) comme de contractuels.

Depuis cette interview, mon département s’est structuré. Nous disposons de trois pôles : RH et attractivité, mobilité et parcours ainsi que, enfin, le Campus du Numérique Public que nous inaugurons officiellement ce 9 janvier 2024 avec notre ministre de tutelle, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, pour qui le sujet de l’attractivité est une priorité. Nous endossons un rôle de DRH groupe du numérique de l’Etat et servons également de DRH de proximité à la DINUM. Celle-ci a recruté sur un an une quarantaine d’équivalents temps-plein pour accompagner sa très forte croissance.

Quelles sont les difficultés de recrutements en spécialistes du numériques que vous devez affronter ?

Le constat effectué début 2023 est toujours exact et nous le partageons avec toutes les directions du numérique de tous les ministères. L’État a pris du retard dans ce type de recrutements et souffre d’un déficit d’attractivité. Le cas de l’État Français n’est pas unique et est comparable à celui de nombreuses administrations en Europe.

Mais, en menant les récents recrutements de la DINUM, nous avons aussi pu voir nos atouts. Nous pouvons ainsi nous targuer d’un fonctionnement sain et de proposer des postes et des carrières qui ont du sens.

Malgré tout, parfois, nous perdons des candidats parce que nos processus de recrutement sont trop lourds et trop lents. Les candidats trouvent donc des postes ailleurs plus rapidement. Nous souffrons également d’un manque de visibilité sur les principales plates-formes de recrutement, raison pour laquelle nous avons récemment développé des pages employeurs sur certaines.

La structure des salaires est actuellement un gros chantier. Nous actualisons les grilles de salaires de référence pour début 2024. Ce « référentiel de rémunération des contractuels du numérique » permet aux administrations de recruter des contractuels de manière souple car sans avoir à obtenir un accord du contrôleur budgétaire grâce à ce référentiel partagé entre administrations. Ce dispositif est essentiel pour mener la réinternalisation des compétences. L’actualisation devrait adopter une logique de fourchettes plutôt que d’un montant précis et permettre des dérogations.

Comment décrivez-vous le nouveau dispositif du Campus du Numérique Public ?

Il s’agit de permettre aux agents de la filière numérique de l’État de se former mais aussi de co-construire des formations avec les clients internes (administrations, établissements publics…) en apportant ingénierie et financement. Enfin, nous souhaitons également que des experts internes puissent plus facilement devenir formateurs et rejoindre une véritable communauté professionnelle dédiée.

il s’agit à la fois d’une plateforme d’initiatives, d’un accompagnateur et accélérateur de formations existantes (par exemple le parcours cybersécurité proposé par l’ANSSI), d’un co-designer et enfin d’un co-producteur, producteur et organisateur de formations.

Les premières offres sont déjà disponibles. Comme la plupart des dispositifs proposés par la DINUM, nous avons adopté le mode produit : nous avons des premières briques très concrètes et nous en ajoutons au fur et à mesure sans attendre, pour ouvrir, que tout soit disponible.

Quelles types de formations proposez-vous ?

Il peut s’agir de tous types de formations que nous agrégeons, organisons ou suscitons : digitales ou présentielles, courtes ou longues, etc. Nous visons autant ceux qui sont déjà dans la filière numérique pour qu’ils puissent progresser que tous les autres agents. Les formations peuvent viser à développer une culture numérique autant que de permettre une reconversion au sein de la filière numérique de professionnels ayant d’autres métiers. Nous voulons donc aussi susciter de nouvelles vocations au sein de la fonction publique d’État. Par exemple, nous pourrons reconvertir vers le numérique des agents qui sont dans des métiers en déclin.

Nous travaillons également au développement de la culture numérique des hauts décisionnaires publics qui constituent une cible spécifique. Il s’agit que ceux-ci s’emparent du sujet de la transformation numérique.

On a pu voir dans certains projets numériques menés par l’État un fort déficit de maîtrise d’ouvrage insuffisamment compétente sur les métiers à servir. Le Campus va-t-il remédier à cet état de fait ?

En formation continue, nous avons une thématique dans le catalogue de formations qui est la chefferie de projets/de produits. Nous voulons aussi accroître les formations en pilotage de projets car nous avons aujourd’hui recours à trop de prestataires extérieurs qui, par définition, connaissent mal nos métiers. Ce type de formations (courtes) constitue une réponse à ce problème et qui va dans le sens d’une réinternalisation des compétences.

Concrètement, si je suis fonctionnaire avec un métier quelconque et que je veux me lancer dans le numérique, que dois-je faire ?

D’abord, pour les agents extérieurs à la filière numérique, nous avons des formations courtes pour goûter au numérique public.

Ensuite, nous allons créer, au fil de l’année 2024, des programmes de reconversion. Ces formations ne vont pas nécessairement durer des années. Nous travaillons, sur ce sujet, avec des organismes habitués au secteur privé comme au secteur public ou dédié à des publics en difficultés.

Quels types de formats de formations proposez-vous et allez-vous proposer ?

Bien évidemment, il y a et il y aura des formats vidéos, des MOOCs, etc. mais aussi des formations physiques, en présentiel. Les formations peuvent être issues d’une co-construction (sur le modèle du Ministère des Armées avec l’Epita) comme d’une initiative propre à la DINUM ou à des administrations. Nous sommes tout à fait ouverts à travailler, à terme, avec des acteurs externes.

En fonction des besoins, nous pourrons varier les lieux. Par exemple, pour former aujourd’hui plus d’une centaine de directeurs d’administrations centrales, nous utilisons les locaux de l’INSP (Institut national du service public, successeur de l’ENA).

Nous pensons également mettre en œuvre des « learnings expeditions » pour des cadres dirigeants d’administrations. D’autres formats seront sans doute ajoutés au fur et à mesure.

Quelles sont les prochaines échéances ?

Le catalogue actuellement en ligne comprend d’ores et déjà quelques dates de certaines formations. Le calendrier de développement des futures formations n’est pas, pour l’heure, encore finalisé.

Quels sont les défis et les perspectives du Campus du Numérique Public ?

Le premier défi, c’est de parvenir à embarquer tout le monde. Il faut éviter que le campus soit perçu comme destiné aux seules personnes qui basculeront tout à fait et à temps plein dans le numérique. Très sincèrement, je ne pense pas que les geeks soient ceux qui ont le plus besoin de nous même s’il peut être utile de leur faire découvrir nos besoins particuliers.

Et puis nous devrons faire preuve de beaucoup de pédagogie, notamment pour expliquer des concepts comme l’agile à impact.


En savoir plus

- Le site du Campus du Numérique Public.