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Philippe Roncati (Kyndryl) : « la France est l’un de nos dix pays stratégiques »

Par Bertrand Lemaire | Le | Esn & conseil

Un peu plus d’un an après la scission entre IBM et Kyndryl, Philippe Roncati, président de Kyndryl France, fait le point sur l’entreprise.

Philippe Roncati est président de Kyndryl France depuis sa fondation. - © Kyndryl
Philippe Roncati est président de Kyndryl France depuis sa fondation. - © Kyndryl

Plus d’un an après la séparation entre Kyndryl et IBM, où en est Kyndryl ?

L’opération a été annoncée en octobre 2020 et la société créée au 1er septembre 2021 puis introduite à la bourse de New-York le 4 novembre 2021. Il s’agit du plus gros spin-off de l’histoire de l’informatique.

Aujourd’hui, nous avons 90 000 collaborateurs et 4000 clients dans le monde. Dans nos 430 datacenters à travers le monde, nous opérons 700 000 serveurs pour nos clients avec 70 000 systèmes VMware et 25 000 instances Oracle ou SAP. Nous avons pour mission de moderniser, sécuriser et co-opérer avec nos clients les plates-formes IT. Nous sommes organisés en six practices : IA, cloud, network/edge, core-enterprise, cybersécurité et digital workplace.

Pour répondre aux attentes en matière d’empreinte environnementale, nous nous sommes engagés à atteindre le 0 émission carbone en 2040 et nous avons signé la charte Planet’Tech Care.

En septembre dernier, nous avons lancé Kyndryl Bridge, une plate-forme d’intégration ouverte pour le FinOps, l’IAops, le DevSecOps et le GreenOps.

Kyndryl a la capacité à servir ses clients sur les quatre plates-formes : core enterprise (Legacy), cloud privé, cloud public et edge. Nous croyons beaucoup au edge.

Que constatez-vous sur le marché depuis votre création ? Votre stratégie initiale est-elle en phase avec la situation ?

Depuis un an, le modèle hybride s’est affirmé. Nous constatons que les entreprises qui avaient massivement migré leur SI dans le cloud public s’intéressent désormais beaucoup au modèle hybride. La migration vers le cloud public n’est en effet pas forcément pertinente à cause de l’existence du Legacy, de questions de cybersécurité ou de coût. Nos clients cherchent à reprendre le contrôle. La tendance est donc de passer de l’infogérance traditionnelle à la co-opération. Et le edge fait l’objet de très nombreux démonstrateurs actuellement, surtout dans l’industrie.

Les priorités mises en avant par nos clients sont d’une part la cybersécurité, d’autre part l’impact environnemental et la sobriété numérique. Côté cybersécurité, chacun est désormais conscient de l’importance des enjeux. Chacun sait qu’il sera cyber-attaqué, la seule question étant « quand ? ». D’autant que la moitié des PME cyber-attaquées ont déposé le bilan dans la foulée. Côté RSE, la réponse technique à la nécessaire transition écologique n’est pas sans inconvénient et il faut donc trouver les bons équilibres.

Kyndryl gère ces deux priorités par la gestion intelligente des plates-formes de nos clients et du modèle hybride que nous promouvons, sur toutes les couches : applicatifs, systèmes d’exploitation, réseaux… Nous sommes issus de la division outsoursing d’IBM mais, depuis la séparation, nous n’avons plus à privilégier les technologies d’IBM. Nous pouvons donc travailler avec tous les acteurs de notre écosystème, y compris AWS, OVHcloud, Google ou Capgemini. Nous voulons travailler avec les meilleurs afin de servir au mieux nos clients et faciliter leur transformation numérique.

Beaucoup d’entreprises n’ont pas terminé (voire commencé) leur transformation.

Donc, vous travaillez avec vos concurrents ?

Nous devons travailler ensemble pour nous inscrire dans la durée. C’est de la coopétition. Et nous ouvrons à nos clients comme à nos coopétiteurs notre GNPP (Global Network Pearing Plateform), le réseau sécurisé qui permet d’accéder à nos 430 datacenters dans le monde.

Comme dans beaucoup d’entreprises américaines, Kyndryl France n’est-elle qu’une filiale commerciale ?

Non. Pour Kyndryl, la France est l’un de nos dix pays stratégiques. Cette situation fait que je suis directement rattaché au président groupe et que je suis membre du comité exécutif monde.

Kyndryl a 75 grands clients en France sur les 4000 dans le monde. Mais nous avons une double particularité : environ 200 contrats avec des entreprises plus petites car 95 % des entreprises, en France, sont des PME ou des ETI, et ce qui implique, de notre côté, une forte présence régionale.

Kyndryl France, c’est 196,5 millions d’euros de capital et 1280 collaborateurs. Nous opérons 14 datacenters (chez des acteurs comme Equinix). En tout, 2800 collaborateurs de Kyndryl sont dédiés à la France en incluant des équipes situées en Pologne, en Roumanie, en République Techèque, en Inde… Nous sommes présents avec un plateau entier au Campus Cyber.

Parmi nos collaborateurs, nous avons 90 apprentis dont les trois-quarts futurs ingénieurs et un quart dans une filière commerce-gestion.

Comment ont réagi les clients français à la scission entre IBM et Kyndryl ?

Au départ, il y a eu un effet de surprise et, de ce fait, une certaine défiance. Malheureusement, nous étions obligés, légalement, de communiquer de cette manière sur notre scission. Nous avons donc ensuite réalisé un travail de communication sur le terrain pour expliquer, petit à petit, parfois en avance de phase, ce que nous faisions et pourquoi, en insistant sur les avantages apportés.

Quels défis voyez-vous pour Kyndryl dans les mois à venir ?

Le premier, c’est bien sûr de poursuivre notre rétablissement sur le marché. Nous sommes en ligne avec nos prévisions et nous devrions revenir à l’équilibre financier d’ici 2025 avant de connaître une véritable croissance.

Ensuite, nous devons continuer à être un acteur du changement, à créer de nouveaux modèles de services. Nous avons la taille appropriée pour cela.

Enfin, sous deux à trois ans (avant 2025 en fait), nous devons devenir la marque de choix pour nos clients comme pour nos collaborateurs. Au delà de tenir nos engagement, nous avons donc à travailler sur notre notoriété et notre image.


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